Format XBRL pour la CSRD : à quoi s’attendre ?
10-12-2024 - par Célestine Moreira

Que dit la CSRD à propos de la taxonomie XBRL ?
Dans le cadre de la CSRD, l'EFRAG (European Financial Reporting Advisory Group) rend obligatoire et surtout public le reporting des informations de durabilité des entreprises européennes. Le but de cette directive est de rendre les performances ESG des entreprises les plus transparentes et accessibles possible.
Mais la CSRD c’est aussi et surtout un grand nombre d’indicateurs et de points de données ESG à fournir, rendant la lecture et la compréhension des rapports de durabilité complexe. Pour palier ce problème et rendre les données ESG réellement accessible, la CSRD imposera prochainement le tagging XBRL ESRS pour le balisage de l’ensemble des rapports de durabilité. Encore en cours de développement, cette taxonomie suivra la première vague de publication des reportings CSRD des grandes entreprises européennes.
Rappel sur le calendrier de la CSRD
Pour rappel, la CSRD ne concerne pas toutes les entreprises européennes d’un coup. Elle s’applique graduellement, des plus grandes entreprises aux plus petites. Voici un résumé du calendrier de publication de la CSRD selon l'EFRAG :
- 2024 (publication en 2025) : la CSRD s'applique aux entreprises européennes cotées déjà soumises à la directive NFRD (Non-Financial Reporting Directive).
- 2025 (publication en 2026) : la CSRD s'étend à toutes les grandes entreprises européennes cotées qui remplissent au moins deux des trois critères suivants :
- Effectif supérieur à 250 salariés,
- CA annuel dépassant 40 millions d'euros,
- Total du bilan excédant 20 millions d'euros.
- 2026 (publication en 2027) : les PMEs européennes cotées, à l'exception des micro-entreprises, devront collecter leurs données ESG dès janvier 2026. Elles pourront bénéficier d'une option de report de leur obligation de reporting allant jusqu’à deux ans.
Pourquoi utiliser le tagging XBRL pour la CSRD ?
La taxonomie XBRL (eXtensible Business Reporting Language) est loin d’être nouvelle. Ce langage est déjà utilisé pour les reportings financiers européens. L’ESEF (European Single Electronic Format) a imposé ce langage dans l'Article 3 du Règlement délégué de la Commission (UE) 2019/815. Pour les rapports destinés à être lus par des humains, les entreprises doivent utiliser le XHTML, et pour les rapports destinés à être lus par des machines c’est donc le tagging XBRL qui doit être utilisé.
Le XBRL présente plusieurs avantages, qui en font le futur langage privilégié pour la CSRD selon l'EFRAG.
La standardisation du XBRL pour la CSRD
La taxonomie XBRL dans la CSRD impose les mêmes balises pour toutes les entreprises et pour chacun des points de données demandés, tout en se basant sur les ESRS (European Sustainability Reporting Standards) de l'EFRAG. L’utilisation de ces balises strictes permet de limiter la création de balises personnalisées par chaque entreprise ou organisation, et donc de limiter les interprétations personnelles qui peuvent être faites des informations présentées.
Cela rend donc toutes les organisations comparables sur les mêmes points de données, les empêchant donc d’arranger certains aspects négatifs à leur façon. La donnée ESG est transparente, complète et la même pour toutes les entreprises concernées.
L’interopérabilité de la CSRD avec les taxonomies existantes
Comme évoqué plus tôt, l’ESEF impose le tagging XBRL pour les rapports financiers des entreprises européennes depuis 2021, mais d’autres entités l’imposent également. C’est par exemple le cas de la SEC (Security and Exchange Commission) aux États-Unis qui l’impose depuis 2009, ou bien des règlementations Solvabilité II et Bâle III en Europe.
Toutes ces règlementations utilisent le langage XBRL, le mettre en place pour la CSRD est une façon de réutiliser des outils et fonctionnements déjà existants dans les sociétés. Il permet également de placer le rapport de durabilité au même niveau d’exigence que les rapports financiers.
La facilité de lecture par les machines pour la CSRD
L’ESEF a imposé le XHTML pour les fichiers à destination des humains, et le XBRL pour ceux à destination des machines. La réelle force de cette taxonomie est donc sa capacité à être lue, comprise et extraite par des ordinateurs. Cela permet aux régulateurs et OTI (Organismes Tiers Indépendants) de collecter et analyser les données ESG facilement en passant par des logiciels spécialisés.
Cela permettra également à d’autres sociétés de pouvoir créer des benchmarks et comparer des entreprises entre elles. On peut imaginer que des Job Boards (comme Welcome To The Jungle) attribue un score ESG à destination des talents en collectant les informations issues de la CSRD, ou bien que des comparateurs (comme Yuka) intègrent des données ESG dans leurs comparatifs de produits déjà existants.
L’extraction et l’analyse rapides des données ESG grâce à la taxonomie XBRL intéresseront également les investisseurs et organismes financiers, pour évaluer et comparer entre elles les entreprises dans lesquelles ils souhaitent investir.
Comment fonctionne le XBRL pour la CSRD ?
Comprendre les bases du langage XBRL
Le fonctionnement du format XBRL repose sur deux notions principales : les balises (sortes d’étiquettes numériques) et les taxonomies.
Les balises XBRL permettent d’identifier de façon précise et claire chaque point de données au sein d’un rapport. Ces balises sont des marqueurs utilisés pour structurer et standardiser les données ESG, permettant ainsi une lecture plus facile et un traitement automatique par des machines.
Mais pour que ces balises soient bien comprises, il faut les coupler à des taxonomies. Les taxonomies sont des sortes de dictionnaires, qui contiennent les définitions des concepts de informations, les relations qu’elles ont entre elles et leurs propriétés principales. Par exemple, elle précise que le chiffre « 50 » présent à la ligne 256 d’un rapport, correspond spécifiquement à l’indicateur « émission en équivalents de tonnes de CO2 annuelle ». Les taxonomies permettent donc que toutes les entreprises publiant un rapport en XBRL reportent les mêmes données de manière homogène et comparable.
Dans le cas de la CSRD, toute une taxonomie spécifique a été créée : l’XBRL ESRS, qui est toujours en cours de finalisation par l’EFRAG. Cette taxonomie inclura plus de 1 000 points de données, tous corrélés aux normes ESRS. En associant chaque point de données ESG à une balise précise dans cette taxonomie, les rapports de durabilité produits deviendront plus facilement analysables pour toutes les parties prenantes.
En conclusion, la mise en place de la taxonomie XBRL ESRS dans le cadre de la CSRD représente une étape décisive, pour une meilleure standardisation et une plus grande transparence du reporting ESG dans l’Union Européenne. Ce langage a déjà été éprouvé pour le reporting financier, et s'impose désormais comme un standard clé pour structurer les données de durabilité de manière rigoureuse, claire et comparable. En rendant les informations ESG plus accessibles aux humains mais surtout aux machines, le format XBRL ESRS permettra, dès sa mise en application, des analyses plus rapides et approfondies, pour une meilleure compréhension des enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernance des entreprises.
Le reporting CSRD publié avec le format XBRL permettra aux parties prenantes (investisseurs, régulateurs, consommateurs, talents…) de disposer de données fiables et sans abigüités pour prendre des décisions éclairées. Cette démarche ne se limite pas à un simple exercice réglementaire : elle montre la volonté de l’Union européenne d’intégrer la durabilité au cœur des stratégies d’entreprise, en la plaçant au même niveau de rigueur et d’importance que le reporting financier.