Évaluation des fournisseurs et CSRD : quel processus ?
13-11-2024 - par Célestine Moreira

La CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) impose désormais aux entreprises européennes de publier un rapport très complet sur leurs impacts environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG). Pour être plus précis, cette réglementation s’applique en priorité aux entreprises de l’Union européenne, mais aussi aux entreprise non-européennes qui exercent une partie de leurs activités en Europe. A terme, la CSRD va donc concerner un très grand nombre d’entreprises à travers le monde, qu’elles soient européennes ou non.
Plus complète que sa grande soeur la NFRD (Non-Financial Reporting Directive), la CSRD étend le champ du reporting ESG à l’ensemble de la chaîne de valeur des sociétés. Elle implique davantage les tiers et partenaires dans le processus de reporting, cela inclut donc les fournisseurs !
Dans cet article, on vous explique pourquoi et comment impliquer davantage vos fournisseurs dans votre processus de reporting CSRD.
Pourquoi procéder à l'évaluation de ses fournisseurs pour le reporting CSRD ?
La CSRD demande aux entreprises de rapporter leurs performances ESG de manière très globale… en incluant les impacts générés en amont et en aval, notamment par les fournisseurs !
Pour les entreprises ayant déjà réalisé un bilan carbone cela peut sembler plutôt naturel. L'évaluation de ses fournisseurs peut faire penser aux critères du Scope 3 du GHG Protocol. Mais contrairement au bilan carbone, la CSRD ne demande pas d’évaluer uniquement les émissions de GES (Gaz à Effet de Serre). La CSRD prend effectivement en compte l’impact général des activités des fournisseurs sur les enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernance. Parmi les différents indicateurs ESG à évaluer auprès des fournisseurs, on peut retrouver par exemple :
- L’impact des fournisseurs sur la biodiversité. Par exemple, une entreprise textile devra évaluer si son fournisseur de coton utilisent des pesticides respectueux de la biodiversité ou non.
- L’impact des fournisseurs sur les communautés. Par exemple, une société utilisant des métaux devra s’assurer que les raffineries avec lesquelles elle travaille protègent les populations près de leurs sites de production des effets sur leur santé.
- L’utilisation des ressources par les fournisseurs. Par exemple, une entreprise louant des ordinateurs pour ses employés devra évaluer comment est gérée la fin de vie des appareils du loueur.
- … et de nombreux autres paramètres à prendre en compte, qui sont compilés dans les ESRS définis par l’EFRAG.
Les défis de la collecte de données ESG pour l'évaluation des fournisseurs
Harmoniser les données ESG des fournisseurs pour en assurer la fiabilité
Le défi principal de la CSRD est d’assurer la fiabilité et la traçabilité des informations collectées par les entreprises. C’est d’autant plus crucial lorsque ces données sont collectées en externe, notamment lors de l'évaluation des fournisseurs. Chaque fournisseur a ses propres pratiques de reporting, et comme toutes les entreprises ne sont pas encore soumises à la CSRD, la gestion des donnée n’est pas identique chez tous les fournisseurs. Le but des entreprises qui se mettent en conformité avec la CSRD est donc de collecter mais surtout harmoniser les informations des fournisseurs, pour les rendre exploitables dans le cadre de leur processus de reporting.
Pour relever ce défi, il est donc important de définir dès le début les indicateurs de reporting qui seront communs à tous pour l'évaluation. Dans le cas de la CSRD, il est fortement conseillé de suivre les indicateurs proposés par l’EFRAG (European Financial Reporting Advisory Group). Les indicateurs de l’EFRAG sont catégorisés en ESRS globaux mais aussi thématiques, qui peuvent donc s’appliquer à toutes les entreprises qui souhaitent évaluer leur impact et se mettre en conformité avec la CSRD. Pour définir les bons ESRS et par extension les bons indicateurs à suivre, les équipes RSE doivent effectuer une analyse double-matérialité. Cette analyse permettra de définir quels sont les indicateurs applicables et non-applicables à l’entreprise, et donc de choisir les critères d'évaluation des fournisseurs.
Certains outils permettent également d’harmoniser automatiquement les données ESG historiques pour gagner du temps sur le processus d'analyse. C’est le cas de Zei, qui permet d’inviter chaque fournisseur à déclarer leurs performances ESG via des questionnaires sur-mesure. L’outil harmonise ensuite les informations collectées avec le reporting CSRD ainsi que de nombreux autres référentiels pour éviter la double-saisie et une meilleure gestion des données ESG.
Organiser la collecte des données ESG de ses fournisseurs : mode d’emploi pour la CSRD
Pour réussir la collecte et la gestion des données ESG de ses fournisseurs, il faut mettre en place un processus méthodique. Voici un exemple de feuille de route pour l’évaluation des fournisseurs dans le cadre de la CSRD :
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Étape 1 : Identifier les fournisseurs critiques
Tous les fournisseurs ne vont pas avoir le même impact sur le reporting CSRD de l’entreprise. Il faut identifier et prioriser en amont les fournisseurs qui vont avoir un impact important sur la chaîne de valeur. Il est possible de segmenter ces fournisseurs en fonction de plusieurs critères : en fonction du volume d’achats, du niveau d’impact environnemental et social que cela engendre, du niveau d’importance des produits ou services achetés dans la chaîne de valeur…
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Étape 2 : Définir les critères et indicateurs ESG pour chaque catégorie de fournisseurs
Pour pouvoir comparer et harmoniser au mieux les informations et données ESG des fournisseurs, la clé est la définition des indicateurs à suivre. Dans le cas de la CSRD, comme dit plus haut, il est pertinent de s’appuyer sur les ESRS définis par l’EFRAG pour l'évaluation. Mais il existe d’autres référentiels qui peuvent s’avérer pertinents en fonction des situations, comme la GRI ou les normes ISO. Dans tous les cas, il faut que les indicateurs choisis soient pertinents et applicables pour chaque catégorie de fournisseurs. Cela permet évidemment de faciliter de reporting, mais cela est également utile pour comparer les fournisseurs entre eux de manière pertinente selon leur typologie, à des fins de benchmark pour les prochains choix de fournisseurs. Ce processus peut être menée de concert avec les équipes achats.
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Étape 3 : Fournir des outils de reporting collaboratifs
Pour éviter les processus à rallonge, les allers-retours par mail et les fichiers aux formats multiples (docs, csv, pdf…) il est conseillé d’intégrer un outil collaboratif adapté au reporting CSRD et à la collecte de données ESG. Cela permet aux fournisseurs d’intégrer les informations facilement avec un point de contact unique, et cela permet à l’entreprise de suivre en temps réel l’avancée de la collecte des données ESG. La notion d’outil collaboratif est cruciale pour fluidifier les échanges et éviter la double-saisie des données ESG.
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Étape 4 : Planifier des contrôles réguliers
Les erreurs humaines et les erreurs de saisie peuvent arriver pendant le processus de collecte. Pour les éviter, il est important de mettre en place un calendrier régulier pour vérifier l’exactitude des données collectées. Ces audits peuvent être menés en interne (par l’équipe RSE ou l’équipe finance par exemple) ou par un organisme tiers. Lors de ces audits, il s’agit de s’assurer que chaque fournisseur respecte les standards imposés par l’entreprise, et détecter les incohérences ou potentielles anomalies. Au plus les informations et performances ESG seront vérifiées, au plus le processus de reporting CSRD sera exact et crédible auprès des parties prenantes (investisseurs, consommateurs…).
Les outils tels que Zei permettent d’opérer ces 4 étapes dans une seule plateforme. La structure est personnalisable en fonction des typologies de fournisseurs (taille, secteur, impact…). Zei permet donc d’avoir une gestion globale de son écosystème pour prendre des décisions éclairées par la donnée ESG.
Construire une chaîne de valeur durable et compétitive grâce à la CSRD
Former ses fournisseurs aux pratiques durables et à la gestion de données ESG
La collecte de données ESG pour la CSRD n’est pas une fin en soi. Ce processus de collecte, de structuration et d’analyse doit permettre aux entreprises de se rapprocher de leurs fournisseurs sur les sujets ESG, et de les accompagner en cas de besoin. Aider chaque fournisseur à adopter des pratiques durables c’est améliorer sa propre performance ESG, et donc assurer une meilleure conformité CSRD.
Pour sensibiliser les fournisseurs aux pratiques durables, plusieurs solutions existent :
- Des ateliers et formations collectives sur les bonnes pratiques à adopter. Par exemple, une entreprise agroalimentaire peut organiser des ateliers pratiques sur les pesticides naturels et respectueux de la biodiversité auprès de ses fournisseurs agricoles.
- Des méthodologies et guides pratiques à diffuser. Par exemple, une entreprise de cosmétiques peut faire circuler auprès de ses fournisseurs des rappels sur la gestion du recyclage des emballages abîmés ou non conformes.
- Des modules de e-learning. Par exemple, une entreprise de textile peut proposer à ses fournisseurs de teinture de suivre un parcours e-learning sur les enjeux d’égalité homme-femme dans les entreprises.
- Des groupes de travail collaboratifs. Par exemple une entreprise technologique peut réunir ses fournisseurs principaux pour établir ensemble une charte de fournisseur éthique, ou convenir d’un label sur lequel se positionner.
- Des outils comme Zei, qui guide les partenaires sur les processus et indicateurs les plus importants. Zei met également à disposition des partenaires un tableau de bord pour suivre ses progrès en toute autonomie…
Il est également possible de rédiger une charte d’achats responsables, pour aiguiller les fournisseurs sur les politiques d’achats de l’entreprise. Cette charte peut également aider les équipes internes à choisir des fournisseurs qui remplissent leurs exigences et critères ESG.
Transformer l’obligation de la CSRD en avantage concurrentiel
La CSRD peut facilement être perçue comme une contrainte par les directions RSE au vu de la quantité de critères à monitorer. Mais les entreprises qui sauront en faire ressortir une opportunité obtiendront un avantage concurrentiel non négligeable.
Qu’il s’agisse de consommateurs ou d’investisseurs, les critères de choix des parties prenantes se tournent de plus en plus sur les politiques ESG des entreprises. Une entreprise qui démontre une transparence totale sur l’impact de ses activités et le choix de ses fournisseurs pourra ainsi se positionner en leader de la durabilité dans son secteur. Et dans tous les cas, à terme la CSRD deviendra obligatoire pour tous. Faire partie des bons élèves dès le début permet de prendre de l’avance, et donc de se positionner en leader des enjeux ESG dans son secteur.
L’impact des entreprises est au coeur des préoccupations de ces parties prenantes. La CSRD est bien plus qu’une obligation réglementaire, c’est aussi et surtout un nouvel axe de compétitivité sur lequel se positionner.
Pour conclure, la CSRD peut représenter une véritable occasion de renforcer les relations des entreprises avec leurs fournisseurs sur les performances ESG. En intégrant les critères de la CSRD dès aujourd’hui, les entreprises peuvent avoir une vision globale et harmonisée de leurs impacts environnementaux, sociaux et de gouvernance, tout en encourageant chaque fournisseur à adopter des pratiques plus durables.
L’effort que représente l’évaluation des fournisseurs est loin d’être une simple mise en conformité, il peut les aider à se démarquer dans un marché où les pratiques éthiques et durables sont de plus en plus au centre des discussions.
La CSRD est un ticket d’entrée vers la construction d’une chaîne de valeur plus compétitive et surtout plus durable.