Rapport RSE : 5 étapes pour le rédiger
04-06-2025 - par Célestine Moreira

La publication d’un rapport RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises) ne se résume plus à une obligation de communication ou à un exercice annuel figé. Elle est un levier stratégique de transformation, d’alignement interne et de dialogue avec les parties prenantes. Mais pour que ce rapport joue pleinement son rôle, il faut structurer sa démarche en amont : objectifs, gouvernance, référentiels, architecture de données, indicateurs… chaque décision compte.
Définir les objectifs stratégiques du rapport RSE
Avant toute chose, il faut clarifier le rôle que le rapport sera censé jouer dans la stratégie globale de l’entreprise. Cette étape permet de tracer le périmètre du reporting, le niveau de détail attendu, les parties prenantes mobilisées et les canaux de diffusion du rapport RSE.
Pourquoi publier un rapport RSE ?
Longtemps, le rapport RSE a été vu comme un outil de communication ou de marque employeur pour les entreprises, avec des "bonnes pratiques" vagues à l'impact limité. Aujourd’hui, son impact est beaucoup plus large, et ses objectifs plus structurés et globaux. Lorsqu’on parle de l’intérêt du rapport RSE pour une entreprise, trois grandes familles d’objectifs émergent :
- La conformité réglementaire, dans le cadre de la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) par exemple, de la DPEF (Déclaration de Performance Extra-Financière) ou d'autres obligations sectorielles auxquelles sont soumises les entreprises
- La transparence vis-à-vis des parties prenantes, notamment en réponse aux attentes croissantes des investisseurs et clients en matière d’ESG pour les entreprises dans lesquelles ils investissent ou achètent
- Le positionnement stratégique, avec le développement de l’attractivité employeur, du discours de marque ou la valorisation de la transformation durable de l'entreprise via les actions menées
Clarifier les usages internes et externes du rapport
Au-delà des objectifs à se fixer, les entreprises doivent se poser la question des utilisations concrètes de leur rapport RSE. Certaines entreprises rédigent leur apport RSE avant tout comme un outil interne de pilotage : support de dialogue entre les différentes directions, outil de suivi des KPIs commun, base de travail pour la fixation d'actions RSE à l’échelle de l’entreprise... D’autres entreprises y voient un levier externe : preuve à fournir à un investisseur, réponse à un appel d’offres, vitrine auprès des candidats ou des médias…
Il est donc important pour les entreprises, dès le lancement du projet, d’identifier les utilisateurs finaux du rapport RSE : direction générale, finance, RH, clients, OTI… Cela permet de définir à l’avance des formats différenciés et de mieux ancrer le rapport dans les processus existants de l'entreprise. L’enjeu est de ne pas produire un rapport isolé, mais un document aligné avec la roadmap stratégique et utilisable au quotidien par les différentes équipes et directions.
Cartographier les parties prenantes et définir la gouvernance du rapport RSE
Le contenu d’un rapport RSE vraiment pertinent est censé refléter les attentes des parties prenantes concernées par ce rapport. Cette étape sert à structurer le dialogue, poser les bases de la gouvernance du projet, et sécuriser la fiabilité des données dès le lancement de la collecte.
Cartographier les parties prenantes pour le rapport RSE
Pour le rapport RSE, les parties prenantes internes (salariés, directions métiers, actionnaires) et externes (clients, fournisseurs, régulateurs, ONG, riverains…) de l'entreprise doivent être identifiées, hiérarchisées et intégrées dans la construction du rapport. La méthode de la matrice influence/intérêt permet de mener cette analyse des parties prenantes de manière complète et méthodique.
Elle permet de positionner chaque partie prenante de l'entreprise en fonction de deux critères :
- Son pouvoir d’influence sur les décisions ou le fonctionnement global de l’entreprise
- Son niveau d’intérêt vis-à-vis des actions RSE ou de la performance extra-financière
On obtient avec ces deux critères une cartographie en quatre parties :
- Influence forte / Intérêt fort : parties prenantes stratégiques (investisseurs institutionnels, clients majeurs, autorités de régulation…) à impliquer pleinement dans la définition des priorités ESG et les décisions stratégiques en termes de RSE
- Influence forte / Intérêt faible : acteurs à tenir informés de l’avancement du projet de rapport RSE, tout en anticipant de potentielles évolutions de leur niveau d’engagement
- Influence faible / Intérêt fort : parties prenantes à écouter activement, souvent sources de signaux faibles ou de pistes d’innovations (représentants des salariés, ONG, fournisseurs clés…)
- Influence faible / Intérêt faible : peu de vigilance à mettre en place, mais à surveiller dans le temps
Constituer une task force inter-départements pour le rapport RSE
Un rapport RSE mobilise de nombreuses expertises : finance pour les indicateurs quantitatifs, RH pour les données sociales, achats pour la chaîne de valeur, IT pour la collecte, juridique pour les aspects de conformité... Une task force dédiée, réunissant des référents de chaque direction de l'entreprise, permet de fluidifier les échanges et de répartir les responsabilités.
Parmi les bonnes pratiques, on peut aussi citer l’implication du COMEX de l'entreprise ou d’un sponsor interne est souvent déterminante pour garantir l’alignement stratégique du projet et faciliter les arbitrages.
Sécuriser la traçabilité et la qualité des données
La crédibilité du rapport RSE repose sur la qualité des données publiées par l’entreprise. Il est essentiel de documenter dès le départ les processus de collecte, les choix méthodologiques (notamment en termes de bilan carbone par exemple) et les sources utilisées pour la rédaction de ce rapport. Une bonne documentation facilite la consolidation des données, permet une relecture critique efficace, et anticipe les exigences d’un audit externe. Cette rigueur doit s’appliquer à toutes les dimensions du reporting que cela soit les définitions d’indicateurs, l’évaluation des périmètres couverts, les choix des méthodes de calcul ou des outils de vérification de la donnée ESG.
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Construire l’architecture ESG pour le rapport RSE
L’architecture du rapport repose sur le choix des référentiels et sur la capacité à produire des données cohérentes, comparables et interopérables d'un bilan à l'autre.
Choisir les référentiels de reporting les plus adaptés
Le choix du ou des référentiels de reporting est une étape structurante dans la conception d’un rapport RSE. Ce choix conditionne le périmètre des informations à publier, mais aussi leurs définitions, leur comparabilité et leur méthode de calcul.
La sélection du référentiel à utiliser comme trame dépend de plusieurs facteurs :
- le statut réglementaire de l’entreprise (est-elle soumise à la CSRD ? au BEGES ?)
- la maturité de sa démarche RSE (a-t-elle suffisamment de ressources internes ?)
- les attentes de ses investisseurs et clients (questionnaires fournisseurs ? investisseurs ?)
- la couverture géographique de ses activités (faut-il un référentiel international ?)
Parmi les référentiels les plus couramment utilisés l’on retrouve :
- les ESRS (European Sustainability Reporting Standards) : ils sont incontournables pour les entreprises concernées par la directive CSRD. Ce cadre impose une structure complète, articulée autour de la double matérialité, de la gouvernance, de la stratégie, des indicateurs chiffrés et d’informations contextuelles pour mieux comprendre le bilan
- la GRI (Global Reporting Initiative) : c’est un des référentiels volontaires les plus utilisés au monde. Il adopte une approche modulaire, centrée sur la matérialité des enjeux et la transparence des impacts. Il est adapté aux organisations qui souhaitent initier ou approfondir une démarche structurée et progressive de reporting extra-financier
- le SASB (Sustainability Accounting Standards Board) : il est davantage orienté finance durable et s’adresse surtout aux entreprises cotées ou à forte exposition aux marchés financiers. Il permet de cibler les enjeux les plus pertinents du point de vue des investisseurs et d’aligner la communication ESG avec les attentes des analystes
- les ODD (Objectifs de Développement Durable) : bien qu’ils ne constituent pas à proprement parler un cadre de reporting, les ODD peuvent être utilisés comme grille de lecture globale pour inscrire la démarche de l’entreprise dans les grandes priorités mondiales qui ont été définies par l’ONU d’ici à 2030
Le choix d’un référentiel unique n’est pas toujours suffisant. De plus en plus d'entreprises adoptent une approche hybride, combinant plusieurs cadres pour répondre à des besoins multiples : se conformer aux exigences réglementaires, dialoguer efficacement avec les investisseurs, structurer la gouvernance interne, ou encore valoriser leur impact sociétal.
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Intégrer les exigences de cohérence inter-réglementaire et l’interopérabilité des données
La convergence des réglementations européennes (CSRD, SFDR, Taxonomie…) rend indispensable une architecture de données harmonisée pour le bilan ESG de l'entreprise. L’interopérabilité devient un enjeu majeur : les données doivent pouvoir circuler entre différents formats (notamment XBRL, déjà utilisé dans de nombreux reportings européens obligatoires), systèmes d’information, outils de pilotage ou plateformes d’évaluation et d’audit.
Construire dès le départ une méthode harmonisée et unifiée des données extra-financières permet de réduire les coûts de mise en conformité, de limiter les redondances et de renforcer la lisibilité du rapport RSE. Cela permet également de gagner du temps sur de futurs reportings, la donnée existant déjà au bon format dans l’architecture ESG de l’entreprise.
Définir et collecter les indicateurs du rapport RSE
La définition des indicateurs ainsi que leur collecte sont vraiment la colonne vertébrale du rapport. Leur pertinence, leur fiabilité et leur traçabilité assurent la crédibilité du rapport RSE auprès de toutes les parties prenantes.
Organiser la collecte multi-source de données
Les données ESG proviennent de sources différentes et peu harmonisées : systèmes d’information internes, directions métiers, filiales, sites industriels, fournisseurs, sous-traitants... Face à cette diversité de sources, les bonnes pratiques sont :
- Clarifier les responsabilités de collecte au sein des différentes entités ou directions métiers
- Harmoniser les formats de remontée d’informations
- Mettre en place des outils collaboratifs et une gouvernance data adaptée
La centralisation progressive des données dans un outil unique permet de gagner en réactivité et d’assurer une meilleure traçabilité des données ESG. Pour plus de conseils, consultez notre article dédié à la collecte des données ESG multisites !
Garantir la fiabilité, la traçabilité et la documentation
La mise en place d’un contrôle interne structuré est aujourd’hui indispensable pour garantir la fiabilité des données du rapport RSE. Il ne s’agit plus seulement de compiler des chiffres : chaque indicateur doit être traçable, explicable et reproductible. Les entreprises doivent donc mettre en place des mécanismes de vérification et de documentation à chaque étape du processus de reporting.
Par exemple, dans le cas d’un indicateur de type "émissions de gaz à effet de serre scope 3 liées aux achats" plusieurs types de documentations peuvent être demandés :
- la définition précise de l’indicateur selon la méthodologique retenue (GHG Protocol, ADEME…)
- le périmètre couvert (quelles catégories d’achats inclut-on ? Les filiales étrangères ? Les prestations de service ?)
- la fréquence de mise à jour des données (mensuelle, trimestrielle, annuelle…)
- les sources de données utilisées (ERP achats, déclarations fournisseurs, calculs extrapolés…)
- le responsable métier identifié pour la collecte et la validation
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Ce type de méthodologique rigoureuse permet d’éviter les écarts d’interprétation d’un exercice à l’autre, mais aussi entre différentes entités qui contribuent au rapport RSE. Elle facilite la revue par les directions concernées (achats, finance, RSE…) et anticipe les questions des auditeurs externes et des parties prenantes.
Communiquer et valoriser son rapport RSE
La publication du rapport marque le début d’une nouvelle phase : celle de la diffusion, de l’appropriation et de la mise en place d'actions RSE, pour un développement global.
Adapter le discours aux différentes parties prenantes
Une fois publié, le rapport RSE ne doit pas se cantonner à un PDF figé, à ne consulter qu’une fois par an. Pour remplir pleinement son rôle stratégique, ce bilan doit être décliné en plusieurs formats, adaptés aux différentes personnes concernées par ce rapport RSE. L’objectif est de maximiser l’appropriation et la compréhension des informations clés, renforcer l’impact du travail mené, et positionner la RSE comme un vrai levier de performance pour l’entreprise.
Un seul rapport RSE peut donc se décliner sous plusieurs formats :
- Une version synthétique pour le COMEX, structurée autour des indicateurs phares, des tendances annuelles et des axes de progrès. Ce format, souvent limité à 4 ou 5 pages, permet d’alimenter directement les discussions stratégiques et les arbitrages budgétaires
- Un support visuel, vulgarisé et centré sur les actions concrètes, à destination des employés. Cela peut être une infographie imprimée ou un module interactif et gamifié. Ce type de contenu facilite la compréhension des enjeux ESG pour des publics non-experts, tout en motivant la mobilisation interne
- Une slide du bilan des données ESG clés pour les clients ou investisseurs, qui peut être intégrée à des propositions commerciales ou à des pitchs decks. Ce format met l’accent sur les performances environnementales, la stratégie climat ou l'engagement en matière de chaîne d’approvisionnement responsable, en fonction de l’interlocuteur en face
- Un document complet, mis à disposition sur le site web ou dans les réponses aux appels d’offres, conforme aux référentiels utilisés (CSRD, GRI, ISO 26000…) et documentant l’ensemble des méthodologies employées
Exploiter le rapport comme outil de transformation
Le rapport RSE ne doit pas être perçu comme un livrable à usage unique. Une fois publié, il peut (et doit !) devenir un outil structurant pour l’entreprise, dans une dynamique de responsabilité, de transformation durable et de mise en place d'actions concrètes. Cela demande une intégration concrète des données ESG dans les processus opérationnels et décisionnels. Cela peut passer par plusieurs choses :
- Pilotage opérationnel : intégration des indicateurs ESG dans les tableaux de bord, comités de pilotage ou systèmes de management
- Reconnaissance et incitations internes : indexation des variables managériales sur des KPIs RSE (accidents du travail, émissions, évaluation des fournisseurs…) pour transformer les objectifs RSE en leviers de performance
- Orientation stratégique : utilisation des données ESG pour prioriser les achats, orienter l’innovation ou les investissements
- Dialogue stratégique : utilisation du rapport pour objectiver les écarts entre ambition et réalité, structurer le dialogue avec les parties prenantes, et justifier les décisions prises
Autrement dit, la valeur du rapport RSE dépasse largement son rôle de vitrine : bien utilisé, il devient un outil de pilotage à part entière, capable de soutenir une stratégie de transformation fondée sur la donnée, la transparence et la cohérence, et de mettre en avant les actions et la responsabilité de l'entreprise.